La vie d’un athlète de haut niveau n’est pas toujours facile. De nombreux sacrifices se cachent souvent derrière le succès, la gloire et l’abondance financière. Tous les sportifs ne viennent pas d’un milieu aisé. Ils doivent fournir des efforts multiples pour percer dans leur domaine. Ce dévouement, parfois sous-estimé, mène tous les ans des centaines de basketteurs à quitter leur pays pour rallier un tout autre continent. Jouer professionnellement au basket à l’étranger est la seule façon pour les basketteurs américains non-retenus en NBA ou en G-League de vivre de la pratique de la balle orange. C’est le chemin qu’a emprunté l’arrière Malcolm Delaney à sa sortie de l’université. Il est aujourd’hui considéré comme étant l’un des meilleurs joueurs à son poste en Europe. Mais l’ancien rookie de l’Élan Chalon-sur-Saône et des Atlanta Hawks n’a pas toujours vécu avec un montant à sept chiffres sur son compte bancaire.
Invité du podcast EuroSteppin présenté par la chaîne Next Ones, Delaney a raconté son ascension vers les sommets. Du choc culturel à son arrivée en France à son premier million de dollars engrangé en Russie, l’actuel joueur de Milan s’est confié sans langue de bois.
« Quand j’ai quitté les États-Unis une fois que j’ai été diplômé de l’Université, j’avais 0 dollar sur mon compte en banque. Je n’ai pas eu une famille qui avait de l’argent. Je n’ai pas contracté de prêt. Mais je connais beaucoup de gars qui en ont pris. Vous savez, je n’ai rien fait de tout ça. Je préférais ne rien avoir et que lorsque j’allais percevoir mon premier chèque, je voulais ressentir que c’est mon argent, que je ne dois rien à personne. Le premier versement que j’ai reçu de l’équipe qui m’a engagé, c’était 5 000 dollars.
Des débuts professionnels à l’Elan Chalon
Mentalement, quand je suis arrivé en France, je n’avais que le basket en tête. Je ne prêtais attention à rien d’autre. Tant que j’ai un bon endroit pour vivre, que je puisse manger, ça me va. Je peux jouer n’importe où. Je suis bon pour me focaliser sur quelque chose, peu importe ce que j’ai à faire. Mon objectif était d’aller là-bas et de performer. Je voulais bien jouer et voir ensuite les opportunités en NBA l’été suivant. Ça a été difficile quand je suis arrivé à Chalon-sur-Saône, mais mentalement j’étais prêt pour ne rien laisser me distraire afin d’atteindre mes ambitions.
La seule chose que je connaissais de la France est Paris. Je pensais que j’allais être à côté, que je vais aller à Paris. Mon vol allait là-bas donc je me suis dit qu’on doit être proche. Ensuite, on a du conduire pendant environ 5 heures de Paris pour rejoindre Chalon. Nous sommes arrivés dans cette petite ville. Ils m’ont présenté mon appartement. Puis ils m’ont dit que nous allions récupérer ma voiture, donc j’étais content. Ils m’ont donné cette petite voiture dont je ne me souviens même plus le nom. Tout le monde dans l’équipe avait de nouveaux véhicules. Le club m’a donné le pire, celui dont personne ne voulait. Il y avait un levier de vitesses et personne ne m’a enseigné comment l’utiliser. Ils m’ont juste donné les clés et m’ont laissé me débrouiller. Je n’arrivais pas à conduire, je leur ai demandé de me ramener chez moi.
Le jour suivant, j’ai du aller à l’épicerie. Je ne pouvais rien lire, tout était en français. Personne ne parlait anglais dans le magasin. Je prenais des choses et je ne savais pas si c’était du poulet, du porc, etc. Je vais à la caisse et les dames me disent que je ne peux pas payer avec une carte. Elle l’a dit en français et je ne comprenais pas ce qu’elle disait. J’étais frustré et je suis parti. Mes deux premiers jours ont été compliqués.
Malcolm Delaney et sa mentalité de winner
Ensuite, ils m’ont aidé pour les choses en dehors du terrain de basket. Durant la pré-saison, nous courrions beaucoup autour d’un lac. Pendant une semaine, j’ai probablement du plus courir que je n’ai conduit. Ça a été mon introduction à l’Europe. J’ai du me réveiller rapidement. C’était fou. Mais j’étais dans la meilleure forme de ma vie. J’étais devant tout le monde lorsque nous partions courir. Je ne voulais pas que les coachs disent des choses négatives sur moi. Je suis professionnel et je suis prêt depuis le premier jour. Mon objectif était clair : performer là-bas puis revenir aux USA pour intégrer la NBA. Je m’en fichais de m’amuser, de prendre un jour de repos.
Partout où j’ai été, mon objectif a été d’être meilleur. Mais aussi de rendre l’équipe meilleure. Et de m’assurer que personne n’ai de chose négatives à dire sur moi. Je vais au travail tous les jours, je suis à l’heure. Quand c’est le moment du match, peu importe que je sois blessé ou malade, je vais essayer de jouer. Aussi, je ne vais pas avoir de problème en dehors du terrain. Ce sont des choses dont je tire de la fierté.
Avec l’Élan Chalon, nous avons tout gagné en France. On a été jusqu’en finale de l’Eurochallenge. Nous avions une équipe avec un petit budget et nous avons affronté le Besiktas, qui avait des millionnaires dans son effectif. Ils sont tous partis à Galatasaray l’année suivante.
Le parcours de Patrick Beverley, une source d’inspiration
Lors de ma deuxième année professionnelle, à l’occasion d’un tournoi de pré-saison, j’ai pu voir jouer Patrick Beverley en vrai pour la première fois. Il jouait pour le Spartak de Saint-Petersbourg. Cette équipe avait beaucoup d’argent. D’un autre côté, mes coéquipiers et moi devions laver nos propres équipements. Mon coach vient me voir et me dit « regarde, est-ce que tu sais combien ce gars gagne ? ». Pat venait de signer un gros contrat, supérieur à un million de dollars.
J’étais étonné pour un joueur qui évolue en Eurocup. On a affronté son équipe en finale du tournoi et j’ai tué le match. J’ai marqué 28 ou 29 points et ai inscrit le panier de la gagne. A la fin de la rencontre, dans mon esprit, je me suis donc dit que je pourrai jouer dans cette équipe la saison suivante ou une autre organisation avec de gros moyens financiers pour gagner moi-aussi un million. Ça a été une marche supplémentaire de franchie dans ma carrière. Il ne le sait même pas, mais Pat Beverley m’a vraiment motivé.
Je n’ai jamais attendu que des équipes NBA m’offrent le minimum. J’ai toujours privilégié les contrats garantis. Je voulais être millionnaire à 25 ans. A cet âge-là, le Lokomotiv Kuban est venu vers moi avec un contrat de deux ans et plus d’argent que je voulais. Donc j’ai signé et je me suis dit qu’après ces deux saisons, j’aurai suffisamment d’argent sur mon compte en banque pour ne plus prendre de décision basée sur des raisons financières ».
La suite, on la connait. Après avoir emmené Kuban au Final Four de l’Euroleague, Malcolm Delaney signa un contrat lucratif de deux ans en NBA avec Atlanta. Il fut ensuite la star des Guangdong Southern Tigers en Chine, avant de revenir sur le Vieux Continent en rejoignant le prestigieux FC Barcelone.