Ancien meneur de jeu au palmarĂšs bien garni (vainqueur de la coupe Korac en 2002, champion de Belgique en 2011, champion de France et MVP de Pro B en 2012, champion de France Pro A en 2014, vainqueur de l’EuroChallenge en 2015), lâex-international français Joseph Gomis (39 ans) sâest reconverti depuis plus dâun an dans le coaching individuel de basketteurs professionnels. Avec pour mission principale de dĂ©velopper Nicolas Batum, toujours en quĂȘte dâune premiĂšre sĂ©lection au All-Star Game NBA. Au cours dâune interview, il nous a parlĂ© de son nouveau quotidien, partagĂ© entre les Etats-Unis et la France.
Tu as récemment lancé ta structure « Jo Go Training ». En quoi consiste-t-elle ?
Joseph Gomis : Je me suis spĂ©cialisĂ© dans le coaching individuel, ce qui est beaucoup dĂ©veloppĂ© aux Etats-Unis. Ce qui mâintĂ©resse, câest de faire progresser les joueurs techniquement, que ce soit le shoot, le dribble, etc. tout les aspects du jeu. Mon travail consiste aussi Ă voir ce quâil leur manque, lâanalyser, Ă©tudier le jeu.
Comment sâest dĂ©roulĂ© cette mutation professionnelle au terme de ta carriĂšre dâathlĂšte ?
Joseph Gomis : AprĂšs ma retraite en tant que basketteur pro, je me suis vite occupĂ© de Nicolas (Batum) aux USA, Ă Charlotte. Petit Ă petit, jâai travaillĂ© avec pas mal dâautres joueurs Ă Paris durant les Ă©tĂ©s. Mais principalement, je travaille Ă lâannĂ©e pour Nicolas en accord avec lâagence Comsport de Bouna Nâdiaye, qui est son agent et aussi le mien. On a commencĂ© Ă travailler ensemble lorsquâil sâest fait transfĂ©rer. JâĂ©tais avec lui cette annĂ©e Ă Charlotte, et normalement je vais repartir lĂ -bas au mois dâoctobre.
Est-ce Nicolas Batum qui est venu vers toi pour collaborer, ou bien lui as-tu proposé tes services ?
Joseph Gomis : Bouna Nâdiaye savait dans quel secteur je voulais me diriger Ă la fin de ma carriĂšre, on en avait dĂ©jĂ parlĂ©. Ca sâest fait naturellement. Nico en avait besoin, et pour moi câĂ©tait lâopportunitĂ© de le dĂ©couvrir, le faire progresser et de passer ce cap qui lui manque.
La période estivale est particuliÚrement propice au développement individuel des joueurs. Quel est le programme concernant Nicolas Batum ?
Joseph Gomis : Actuellement, Nico revient de vacances. On a travaillĂ© directement en fin de saison Ă Charlotte. Quand on est arrivĂ© en France, câĂ©tait plus axĂ© sur le physique. Lorsque lâon va reprendre les entraĂźnements, ça va ĂȘtre un peu un mix des deux (physique et technique) pour repartir et essayer dâĂȘtre le plus prĂȘt possible pour le dĂ©but de saison. Cela va durer de aoĂ»t jusquâĂ mi-septembre Ă peu prĂšs. Ensuite, il va repartir aux Etats-Unis pour le training camp.
« Si tu veux progresser, il faut mettre du temps. » Joseph Gomis
Sâagit-il dâun perfectionnement quotidien ?
Joseph Gomis : On sâentraĂźne quasiment tout les jours. Si ce nâest que de temps en temps, tu ne progresses pas. Si tu veux progresser, il faut mettre du temps. Câest ce que la majoritĂ© des joueurs font, et câest ce que Nicolas fait. Bien sĂ»r, il a le droit de prendre quelques vacances. Câest lâĂ©tĂ©. En plus, avec les Hornets, ils ont fini tĂŽt la saison. Il nây a pas eu de playoffs. Il faut regarder le calendrier et bien gĂ©rer le temps dâentraĂźnement et de repos car câest important. On a fait des blocks dâentraĂźnements et de rĂ©cupĂ©ration.
Pendant la saison, en quoi le travail est-il diffĂ©rent que durant la trĂȘve ?
Joseph Gomis : Durant la saison, câest vrai que la façon de travailler est diffĂ©rente. Ca va ĂȘtre beaucoup de vidĂ©o, des petits rappels assez courts sur le terrain aprĂšs des entraĂźnements collectifs. Avec lâaccumulation des voyages, des matchs et des dĂ©calages horaires, câest trĂšs compliquĂ© en NBA. Les joueurs qui jouent beaucoup ne sâentraĂźnent pas Ă©normĂ©ment durant la saison, contrairement Ă ceux qui ont un faible temps de jeu.
Lâaccompagnes-tu lors des dĂ©placements ?
Joseph Gomis : De temps en temps, je le suis lors des matchs Ă lâextĂ©rieur. Câest surtout lors des matchs Ă domicile que je suis prĂ©sent.
« Aux Ătats-Unis, chaque joueur quasiment a son coach personnel »
Dans lâapproche du perfectionnement individuel, en quoi les Etats-Unis sont-ils trĂšs diffĂ©rents par rapport Ă la France ?
Joseph Gomis : Aux USA, le pays est beaucoup plus grand, câest trĂšs dĂ©veloppĂ© avec la NBA. Chaque joueur quasiment a son coach personnel, et ce, depuis tout jeune. MĂȘme les jeunes investissent dans des coachs. Câest un secteur qui est trĂšs dĂ©veloppĂ© aux Etats-Unis. Je ne dis pas quâils ne le font pas, mais dans un groupe, le coach est beaucoup axĂ© sur le collectif. Il y a deux coachs pour douze joueurs, ce nâest pas assez et nâont pas vraiment le temps pour le travail individuel. En tant que joueur NBA, tu es obligĂ© de prendre de ton temps pour progresser individuellement. Câest lĂ que lâon intervient pour pallier un peu les dĂ©fauts, amĂ©liorer par exemple le shoot, le dribble, le jeu dos au panier, la vision.
Envisages-tu de rejoindre Ă terme le staff dâune Ă©quipe professionnelle en Europe ou en NBA ?
Joseph Gomis : Pourquoi pas, câest dans un coin de ma tĂȘte. C’est comme dans tout, j’aimerai Ă©voluer. Jâai des perspectives, notamment de voir en haut et d’intĂ©grer pourquoi pas un staff NBA. Maintenant, je ne connais pas tout du basket. Je continue Ă apprendre, notamment en NBA. Je continue Ă donner le maximum pour faire progresser Nicolas et les joueurs que j’entraĂźne en France.
Avec cette nouvelle activité professionnelle, continues-tu toujours à pratiquer le basket en parallÚle ?
Joseph Gomis : Jâai arrĂȘtĂ© le basket en compĂ©tition. Quand jâai pris ma retraite, je ne me suis pas engagĂ© pour un autre club. Ăa me manque mĂȘme si ça reste que du basket. Ce que je fais maintenant, câest autre chose bien sĂ»r, mais jâessaye de rester le plus en forme possible. Lors de mes sĂ©ances de coaching, je ne dis pas juste aux joueurs « fais ci, fais ça », il faut aussi ĂȘtre capable de montrer, de dĂ©fendre, de proposer autre chose. Je dois rester en forme.
En tant que basketteur professionnel, tu as presque effectué 20 saisons professionnelles, de tes premiers pas en Pro B en 1994 à ta retraite en 2015. Comment expliquer une telle longévité ? Quels conseils donnerais-tu aux sportifs pour durer aussi longtemps ?
Joseph Gomis : Il faut prendre soin de son corps. Le basket et le sport de haut niveau en gĂ©nĂ©ral, câest difficile. Jâessaye dâavoir une hygiĂšne de vie parfaite, de ne pas trop sortir, de bien manger et rĂ©cupĂ©rer.
Je me renseignais sur la nutrition, sur la rĂ©cupĂ©ration, le sommeil, sur pleins de choses pour ĂȘtre au top tout le temps. Quand on a lâopportunitĂ© de jouer Ă haut niveau, je me dis quâil faut se donner tout les moyens pour ĂȘtre au top. Aujourdâhui, on me dit que je peux encore jouer. Mais ĂȘtre sportif professionnel demande beaucoup dâheures dâentraĂźnements Ă©galement. Je suis parti sur un autre projet.
« Jâaurai voulu aller en NBA et gagner un titre, Ă la Tony Parker. »
Utilises-tu cette expérience accumulée en dehors des parquets dans ton nouveau métier ?
Joseph Gomis : Câest un tout. Quand jâentraĂźne, je transmets aussi lâexpĂ©rience que jâai acquise durant ma carriĂšre, ainsi que celle que je continue Ă acquĂ©rir en NBA et dans dâautres situations. On me dit que jâai fait une bonne carriĂšre. Pour moi, jâai rĂ©alisĂ© une carriĂšre correcte. Jâaurai voulu aller en NBA et gagner un titre, Ă la Tony Parker. Câest ça une grande carriĂšre. Jâai fait une petite carriĂšre en essayant de tout donner. Aujourdâhui, jâessaie de redonner ça pour que les joueurs arrivent le plus haut possible en Ă©tant le meilleur joueur possible, et fassent la meilleure carriĂšre possible. Une carriĂšre est courte, donc il faut la rentabiliser rapidement.
Personnellement, quels sont les meilleurs souvenirs de ta carriĂšre ?
Joseph Gomis : Les meilleurs souvenirs, câest de gagner. Quand tu pratiques un sport collectif, câest vraiment difficile de gagner. Quand tu gagnes, câest un soulagement vis Ă vis de tout le travail que tu as fourni. Que cela soit la coupe Korac avec Nancy, aprĂšs avec Nanterre et Limoges, ce sont vraiment de grands moments quand tu soulĂšves un trophĂ©e. DerriĂšre tout ça, il y a un sacrifice, du travail, toute une ville, un peuple.